Profils revue de l’AHA, premier numéro
Le premier numéro de la Revue de l’AHA vient de sortir !
L’architecture au quotidien : regards sur des représentations ordinaires
PRÉSENTATION. La première livraison de la revue Profils s’intéresse aux images d’architectures qui imprègnent notre quotidien. Associées à quantité d’objets et de produits de consommation courante, ces représentations installées au cœur de nos vies diffusent de subtils messages, vecteurs d’une culture spontanée
très largement partagée. Dans cette improbable conquête architecturale lancée aujourd’hui depuis les emballages de savons, les paquets de biscuits, les bibelots disposés sur les commodes ou remisés au fond des placards, les
images de la Tour Eiffel, du château de Chambord, de la place Stanislas ou des remparts de Saint-Malo, éveillent la curiosité et stimulent de nombreux voyages imaginaires. Ce foisonnement qui rend compte d’un phénomène assez banal à travers l’histoire, quelles que soient les aires géographiques considérées, raconte d’incroyables histoires d’architectures en filigrane qui s’épanouissent de l’intimité des intérieurs jusqu’aux symboles distinctifs des États-nations. Billets de banque, timbres-poste, toiles de Jouy, cartes postales, mosaïques, affiches publicitaires, étiquettes de bière, papiers peints, armoiries et logos touristiques, services à thé ou à café, constituent les principaux supports explorés dans ce numéro qui tente de révéler la valeur documentaire de ces sources si peu académiques.
SOMMAIRE. 7. Éric MONIN et Nathalie SIMONNOT, Introduction.
Un vecteur d’identités nationales et politiques. 19. Shahram ABADIE, Architectures sur billets de banque : un siècle d’histoire iranienne en image ; 35. Sami BOUFASSA, Lecture historique de l’architecture à travers la philatélie postcoloniale en Algérie. Symboles et revendications d’un nouvel État ; 47. Aziza GRIL-MARIOTTE, Des paysages lointains aux monuments nationaux : l’imaginaire des motifs architecturaux dans les étoffes d’ameublement (XVIIIe-XIXe siècles).
Des sources pour l’histoire, des images pour l’action. 59. Franca MALSERVISI, Les cartes postales, témoins et vecteurs de l’excroissance des monuments ; 69. Maria Rosaria VITALE, D’une reproduction à l’autre : le rôle de la carte postale et de la métrophotographie dans la reconstitution monumentale après la Grande guerre ; 79. Fabricia FAUQUET, L’architecture du cirque romain et ses images.
Des images qui stimulent l’imagination. Susanne STACHER, Les affiches opérantes. Affiches publicitaires et architecture dans la constitution d’un imaginaire alpin ; 105. Charline SOWA et Claire ROSSET, Une mousse face à la montagne. Ou l’imaginaire alpin dans les bières « nouvelles » ; 119. Véronique DE BRUIGNAC-LA HOUGUE, Architecture et papier peint.
Des productions au service d’une économie culturelle. 133. Julie MANFREDINI, La place du monument dans les armoiries et les logos touristiques ; 143. Aurore CAIGNET, Représenter et vendre des sites du patrimoine industriel dans le Nord de l’Angleterre : l’image transformée de Salts Mill et du People’s History Museum ; 155. Claire AZEMA, Tea & Coffee Piazza, d’une communication de marque à un manifeste du néo-design.
168. Les AUTEURS. 170. RÉSUMÉS (fr/angl.)
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Format 21x25cm, imprimé, 178 p.
24 € / 5€ pour les adhérents. Abonnements possibles
ISSN en cours d’attribution
Tirage : 250 exemplaires
Ce premier numéro a été publié avec le soutien du ministère de la Culture (BRAUP/Lacth Ensap de Lille)
Résumés et présentation des auteurs
Shahram ABADIE, Architectures sur billets de banque : un siècle d’histoire iranienne en image / Buildings on banknotes: a century of Iranian history in images
Au XXe siècle, les billets de banque circulent entre les mains des gens de toutes classes et de tous âges, et deviennent le support privilégié des icônes et des symboles des États. L’Iran est un pays qui traverse alors une période mouvementée, marquée par deux révolutions, deux coups d’état et une guerre. Dans ce contexte tumultueux, des monuments antiques mis au jour par des fouilles archéologiques, des édifices modernes, des mausolées et des bâtiments cultuels ont été, tour à tour, représentés sur les billets de banque iraniens, symbolisant une identité antiquisante, le progrès technologique et l’idéologie dominante. L’histoire du pays est ainsi retracée en images. Cet article montre que si l’exemple des architectures sur les papiers monnaies peut servir, dans la courte durée, à des fins propagandistes et idéologiques, elle pourra, dans une perspective historique plus large, se charger de significations patrimoniales, parfois différente des intentions initiales.
During the twentieth century, banknotes circulated in the hands of people of all classes and ages, and became the privileged support of the symbols and manifestos of states. This century was a turbulent one for Iran that was marked by two revolutions, two coups and a war. In this tumultuous context, ancient monuments discovered by archaeological excavations, modern buildings, mausoleums and worship buildings, have been represented on Iran banknotes, symbolizing an antiquity identity, the technological progress and the dominant ideology, and over all, retracing the history of the country in image. This paper shows that while the use of architectures on paper money can serve in the short term for propagandist and ideological purposes, in a broader historical perspective, it can take on heritage meanings, sometimes contradicting initial intentions.
Auteur : Shahram Abadie est architecte, diplômé de l’université de Téhéran, 2006. Après un master en histoire de l’architecture (ENSA Versailles – université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines, 2008), puis une thèse de doctorat sur l’architecture des cinémas à Paris (université de Strasbourg, 2012), il a été post-doctorant dans le programme ANR-DFG Metacult (2013-2016). Il est, depuis 2016, maître-assistant en histoire et cultures architecturales à l’école nationale supérieure d’architecture de Clermont-Ferrand, membre du GRF Ressources et membre associé de l’EA3400 Arche.
Mots clef : Iran contemporain ; papier-monnaie ; iconographie ; représentation architecturale ; identité nationale ; patrimoine / Contemporary Iran ; money ; iconography ; architectural representation ; national identity ; cultural heritage
Sami BOUFASSA, Lecture historique de l’architecture à travers la philatélie postcoloniale en Algérie. Symboles et revendications d’un nouvel État / A historical reading of architecture through post-colonial philately in Algeria : symbols and requirements
L’Algérie accède à l’indépendance en 1962. L’État récupère l’administration des postes et télécommunications qui émet les timbres et l’architecture va tenir toute sa place dans l’art philatélique. Cette contribution vise à analyser le corpus architectural et son rôle symbolique pour la société et l’économie algérienne depuis la fin de la colonisation. Les revendications de l’Algérie fraichement indépendante, sont nombreuses et variées. Elles s’expriment dans la construction d’infrastructures et par la reconnaissance et la mise en valeur de l’identité algérienne. L’idéologie socialiste, qui marque l’ère Boumediene, s’exprime dans la philatélie par l’émission de timbres mettant en lumière les grands projets architecturaux de cette période comme les villages socialistes et les installations minières de l’Est algérien. Enfin, avec les nouveaux choix politiques des années 1980, l’Algérie s’oriente vers un libéralisme annonciateur des évolutions que le pays va connaître. Le choix d’une analyse chronologique s’impose comme fil conducteur car elle évoque la présence variable de l’architecture sur les timbres et les différentes manières de la représenter. La lecture de ces architectures miniaturisées reste essentielle. Elle livre un imaginaire souhaité et une identité revendiquée.
Algérie acces to independance in 1962. The state recovers the postal service and télécommunication’s administration witch broadcast stamps and the architecture will take all its place in phylatelic art. This contribution ames to analyse the architectural corpus and its symbolic part for the algerian society and economy since the end of colonization. The claims of the recent independent Algeria are numerous and wide. They express themself by the construction of substructure, infrastructure and by the recognition and highlight of the Algerian identity. The socialist ideology during Boumediene era express itself in philathely and stamp’s issue bringing to light the great architectural projects of this period as in socialist villages and mining installations in east of Algeria. Finally, with the new political choices in eightees, Algeria is on the way to liberalism free marketing economics witch advertice the evolutions that the country is going to experience. Chronology developement is essential as a thread because its evoks the variable appareances of architecture in stamps and its mutiple ways of illustration. It’s remains to understand these miniature modèles of architecture. We are invited to read into the architect’s mind and désires, and the identity he claims.
Auteur : Sami Boufassa est architecte et enseignant-chercheur à la faculté de technologie de l’université de Bejaïa (Algérie). Après avoir obtenu un doctorat sur la prospective urbaine, intitulé « Homme, environnement artificiel et prospective : essai sur les rapports entre l’homme et son environnement urbain futur », sous la direction de Jean-Claude Beaune (Université Lyon III, 2002), ses travaux de recherche actuels portent surtout sur l’histoire de l’architecture des XIXe et XXe siècles en Algérie.
Mots clés : Algérie, socialisme, redressement, architecture contemporaine, philatélie postcoloniale / Algeria, socialism, Recovery, contemporary architecture, Post-colonial philately
Aziza GRIL-MARIOTTE, Des paysages lointains aux monuments nationaux : l’imaginaire des motifs architecturaux dans les étoffes d’ameublement (XVIIIe‐XIXe siècles) / From Distant Landscapes to national Monuments: Imagination of architectural Designs Decorating Furniture’s Fabrics (18th-19th centuries)
Entre les années 1800 et 1840, les manufactures de toiles imprimées en France se sont emparées du thème de la représentation des monuments, souvent associée à un pays ou une capitale. Cet engouement pour l’architecture donne lieu à des images emblématiques de pays – la Chine, l’Égypte, l’Italie – ou de grandes capitales, notamment Paris. Si ces images invitent au voyage, rêvé ou réel, les monuments s’avèrent un moyen pour incarner une histoire monumentalisée. Dans le contexte politique de la fin de l’Empire et de l’avènement de la Restauration, ces motifs alimentent une vision de l’histoire de France où la nostalgie de l’ancien temps est un prétexte pour entretenir des idées politiques. Mais ces étoffes destinées à la confection de lit ont d’abord comme finalité de séduire les consommateurs en leur proposant un voyage.
Between the 1800’s and the 1840’s the printed textile manufactories in France have seized the theme of monuments representation, often associated to a country or a capital. This fascination for architecture leads emblematic images of countries – China, Egypt, Italia – or large capitals, especially Paris. If these images invite to a travel, imaginary or real, monuments are a way to incarnate a monumentalized history. In the politic context of the end of the Empire and the Restoration’s advent, these patterns feed a vision of France history where nostalgia of old time is a pretext to maintain political ideas. But these fabrics intended to bed’s manufacture have first as purpose to seduce consumers by offering them a travel.
Auteur : Aziza Gril-Mariotte est maître de conférences en histoire de l’art, Université de Haute-Alsace, chercheur au CRESAT (EA 3436). Après avoir soutenu une thèse sur le textile imprimé au XVIIIe siècle à l’Université d’Aix-Marseille (Les toiles de Jouy. Histoire d’un art décoratif 1760-1821, PUR, 2015), elle poursuit ses recherches sur la création et l’innovation dans les arts industriels, le textile imprimé en Alsace au XIXe siècle.
Mots clef : Textile, motifs historiques, monuments, architecture, ameublement / Textile – historical patterns – monuments – architecture – interior decoration
Franca MALSERVISI, Les cartes postales, témoins et vecteurs de l’excroissance des monuments / Postcards: evidence and vector of the outgrowth of monuments
Dans l’histoire de la préservation du patrimoine bâti, l’évolution de certains corpus d’objets se prête à l’exploitation de représentations iconiques, et notamment celles destinées au grand public. Selon le récit consolidé de l’histoire du patrimoine monumental français, le début du XXe siècle aurait été marqué par l’adoption d’une attitude prudente ayant renoncé aux travaux de réintégration non nécessaires à la conservation. La succession des cartes postales reproduisant un même cadrage du château de Saumur, révèle une mutation saisissante des parties hautes tout au long du XXe siècle. Il s’agit d’un phénomène de « croissance » monumentale porté, dans ce cas emblématique, par l’existence de la miniature des Très Riches Heures du duc de Berry proposant une visualisation du château datée des années 1440. L’analyse de la relation entre cette œuvre picturale et la modification de la matérialité du château, fait émerger l’hypothèse d’une longue régénération des superstructures destinée à favoriser une ressemblance entre représentations photographiques contemporaines et visualisation historique de référence.
In the history of the preservation of heritage buildings, the evolution of some corpus of objects is suitable for work on iconic representations, especially those produced for the general public. According to the consolidated account of the history of the French conservation movement, the beginning of the twentieth century would have been marked by the adoption of a cautious attitude, abandoning all projects not necessary for conservation. The series of postcards reproducing the same framing of the Saumur castle, reveals a striking mutation of the upper parts throughout the 20th century. It is a phenomenon of monumental “growth” supported, in this emblematic case, by the existence of the miniature of Les Très Riches Heures du duc de Berry, proposing an image of the castle dated around 1440. The analysis of the relationship between this pictorial work and the modification of the materiality of the castle, may lead to the hypothesis of a regeneration that is primarily intended to favor a resemblance between contemporary photographic representations and historical reference visualization.
Auteur : Franca Malservisi est architecte diplômée de la Faculté d’architecture de Florence et chercheur au laboratoire LEAV, à l’École nationale supérieure d’architecture de Versailles. Installée à Paris depuis vingt-cinq ans, elle a travaillé dans des agences d’architectes en chef des Monuments historiques et a soutenu, en 2005, une thèse de doctorat intitulée « La Restauration architecturale en France : deux siècles de pratique ordinaire », sous la direction de François Loyer. Depuis 2006, elle assure des interventions sur la théorie et la pratique de la restauration, en tant qu’enseignant vacataire, et travaille sur des diagnostics patrimoniaux en tant qu’architecte-conseil au CAUE du Val-de-Marne.
Mots clefs : Restauration, restitution, carte postale, reproduction photographique, monument / Restauration, architectural restitution, postcard, photographic reproduction, monument
Maria Rosaria VITALE, D’une reproduction à l’autre : le rôle de la carte postale et de la métrophotographie dans la reconstitution monumentale après la Grande Guerre / From one copy to the next : postcards of monuments and the metrophotography in the reconstruction after the Great War
La métrophotographie est l’opération inverse de la mise en perspective. L’application à l’architecture, proposée par Deneux, permettait de restituer les dimensions des édifices à partir de photographies. Ce procédé présentait l’avantage d’économiser le temps des relevés, de permettre la restitution des parties inaccessibles et même, de reconstituer les édifices ruinés à partir de photographies antérieures à la destruction. À partir du manuel de Deneux, l’article vise à explorer le rôle des outils et des technologies de reproduction et diffusion des images du patrimoine en relation avec la conservation de sa matérialité, les statuts différents que l’on a attribué à ces représentations et leur impact sur les choix de restauration des monuments dans l’entre-deux-guerres.
Metrophotography is the inverse operation of the geometric perspective. Its application to architecture, proposed by Deneux, made it possible to establish the dimensions of buildings from photographs. This method offered many advantages : it reduced the time requested for surveys, helped technicians determine the measurements of inaccessible parts and even permitted the reconstruction of ruined buildings by using the photographs taken before their destruction. By focusing on Deneux’s handbook, this article examines the role of new technologies in reproducing and spreading heritage images ; it also aims to investigate the different purposes of theese representations, their influence on the preservation of the monuments’ materiality and the architectural restoration in the interwar years.
Auteur : Maria Rosaria Vitale est chercheur à l’Université de Catane (Italie) où elle enseigne la théorie et l’histoire de la restauration. Elle a obtenu en 1992 un diplôme d’architecte à la Faculté d’architecture de Palerme avant de soutenir une thèse de doctorat sur les restaurations en France de 1970 à 2000. Ses recherches portent principalement sur la théorie de la restauration en Europe et sur les restaurations d’après-guerre.
Mots clefs : métrophotographie, photogrammétrie, Deneux, reconstruction, monuments / metrophotography, photogrammetry, Deneux, reconstruction, monuments
Fabricia FAUQUET, L’architecture du cirque romain et ses images / The Roman circus and its figuration representations.
Dès l’antiquité, une diffusion « mondiale » des produits dérivés d’un spectacle sportif ! Le cirque et ses représentations figurées ont été diffusés dans le temps (du VIIIe siècle avant notre ère au XIIIe siècle) et dans l’espace (celui du monde romain). L’engouement des romains pour les courses de chars est comparable à celui que nous connaissons actuellement pour le football : même ferveur, mêmes rixes entre partisans de différents clubs ou factions. Cet enthousiasme génère de nombreux « produits dérivés » : l’image du cirque est diffusée sur une multitude de supports ; du plus petit (les monnaies) au plus grand (les mosaïques). Face à cette profusion de supports de diffusion, nous nous interrogerons sur les types de media privilégiés pour représenter l’architecture du cirque. Comment celle-ci a-t-elle été représentée et pourquoi ? En quoi ces représentations anciennes sont-elles une source de connaissance de l’architecture et du fonctionnement de cet édifice de spectacle ? Quelles images permettent aujourd’hui à cette architecture disparue d’être toujours présente dans notre imaginaire collectif ?
From the antiquity, a “world” distribution of the by-products of a sports show ! The circus and its figurative representations were diffused in time, of the VIIIth BC in the XIII th century, and in the space, that of the Roman world. The craze of the Roman for this sport is comparable to the one that we know at present for the football: the same fervour, the same fights between the partisans of various clubs or factions. This enthusiasm generates numerous “by-products”: the image of the circus is broadcast on a multitude of media: of the smallest, exchanges them in the biggest: mosaics. In the face of this profusion of supports of distribution, we shall wonder about the types of media favored to represent the architecture of the circus). How was this one represented and why ? In what are these former representations a source of knowledge of the architecture and the functioning of this building ? What images allow this architecture disappeared today to be always present in our collective imagination ?
Auteur : Fabricia Fauquet est architecte dplg, docteur en histoire, auteur d’une thèse intitulée Le cirque romain : essai de théorisation de sa forme et de ses fonctions, soutenue à l’Université de Bordeaux III, sous la direction de Jean-Claude Golvin (2002). Ingénieure de Recherche au sein du laboratoire INAMA [Investigations sur l’histoire et l’actualité des mutations architecturales] de l’École nationale supérieure d’architecture de Marseille, elle poursuit ses recherches sur l’histoire de l’architecture.
Mots clefs : Cirque romain, iconographie antique, ferveur collective, architecture disparue / Roman circus – antique iconography – Collective fervour – structures missing
Susanne STACHER, Les affiches opérantes. Affiches publicitaires et architecture dans la constitution d’un imaginaire alpin. / The efficiency of Posters. Advertising posters and Architecture in the Constitution of an Alpine Imaginary.
La conquête de la « nature sauvage » des Alpes s’est opérée à travers l’histoire par différents motifs. Les affiches publicitaires en illustrent quelques-uns : tandis que les Grands Hôtels cherchent à suggérer un contre-monde pittoresque, les sanatoriums sont représentés comme des objets purs, dans une blancheur digne du terme « hygiène » ; les colonies d’enfants du constructeur automobile Fiat symbolisent avec leur forme en spirale le dynamisme et la conquête. Les affiches, où l’architecture (et le paysage qui y est associé) joue un rôle clé, illustrent de façon synthétique comment ces édifices devaient agir sur l’homme pour atteindre un certain « idéal ». Que celui-ci soit lié à un simple dépaysement, à un mode de guérison ou à un programme d’éducation politique et militaire, le message médiatique y est clair, direct et sans aucune ambiguïté. Les outils publicitaires nous permettent donc de saisir l’architecture autrement, notamment au travers de ses mythes fondateurs qui nous indiquent sa raison d’être et sa manière d’agir sur l’homme.
The conquest of the alpine “wilderness” took place throughout history by various motives. The advertising posters illustrate some of them: whereas the Grand Hotels try to suggest picturesque counter-worlds, sanatoriums are represented as pure objects, corresponding in their perfect whiteness to the new term of “hygiene”; the children’s colonies of the automobile-firm Fiat symbolize with their spiral-shaped forms dynamism and conquest. Posters, where the architecture (and the associated landscape) takes à key-position, illustrate in an explicit way how these buildings should operate on mankind in order to obtain a certain “ideal”. If this one is linked to the simple desire of a change of scenery, to a method of cure or to a political and military education program, the message of the media hasn’t got any ambiguity. The advertising tools thus allow us to seize architecture otherwise, in particular by its founding myths, indicating us its reason of being and its way of operating on man.
Auteur : Susanne Stacher est architecte et critique d’architecture. Elle enseigne en tant que Maître-assistante en théories et pratiques de la conception architecturale et urbaine [TPCAU] à l’ENSA de Versailles, elle est également chercheur au LéaV. Après avoir travaillé dans des agences françaises et internationales (Renzo Piano, Dominique Perrault, Morger & Degelo, Ibos & Vitart et Shigeru Ban), elle se concentre sur la recherche et l’enseignement, qu’elle a débutés en 1999 à l’École polytechnique de Zürich. En septembre 2016, elle soutient sa thèse Dreamland Alps, l’architecture alpine au prisme du sublime (avec les félicitations du jury), en cotutelle de thèse entre l’ENSAV et l’Université des Arts Appliqués de Vienne, sous la codirection de Philippe Potié et Matthias Boeckl. Son champ de recherche se situe entre l’architecture, l’urbanisme, la théorie et la philosophie.
Mots clefs : tourisme, imaginaire, mythe, Alpes, sublime / tourism, imaginary, myth, Alps, sublime
Charline SOWA et Claire ROSSET, Une mousse face à la montagne. Ou l’imaginaire alpin dans les bières « nouvelles » /A drink facing the montain. Or the Alpine imagination in “new” beers
Les étiquettes sont l’un des supports de communication des brasseries de bière. Adaptées à chaque structure de production, elles nous interpellent quant à l’imaginaire qu’elles véhiculent. Depuis vingt ans, le développement des micro-brasseries a renouvelé l’iconographie des étiquettes : forme et traitement graphique. L’architecture tient une place significative, en tant qu’objet identifiable ou participant à la définition d’un paysage. Dans le cadre de cet article, nous interrogerons donc dans quelle mesure l’édifice figuré sur les étiquettes de bière participe à la construction d’un nouvel imaginaire régional en ce début du XXIe siècle. En faisant appel à l’imagerie architecturale, les micro-brasseries semblent doubler leur identification géographique, souvent déjà présente dans le nom de la bière ou de la marque. Nous faisons ainsi l’hypothèse que l’architecture assure la promotion tant du produit que du territoire de production qui se redéfinirait aussi par la valorisation d’activités économiques en pleine expansion, basées sur les circuits-courts et l’artisanat.
Labels are one of the communication media of breweries. They are adapted to each production’s structure and they challenge us as regards the imagination that they convey. For twenty years, the development of micro-breweries has renewed the iconography of labels: form and graphic processing. The architecture holds a significant place as an identifiable object or contributing to the definition of a landscape. In this article, we will examine to what extent the represented edifice on labels of beer participates in the construction of a new regional imagination at the beginning of the 21st century. By using the architectural imagination, micro-breweries seem to double their geographical identification, generally present in the name of the beer or the brand. We thus assume that the architecture assures the promotion as much as the product as the production territory. This last would also be redefined by the valorization of economic activities in full expansion based on the local market and the handicrafts.
Auteurs : Charline Sowa est architecte-urbaniste, docteur en architecture et chercheur associé au laboratoire MHAevt (École nationale supérieure d’architecture de Grenoble – Université Grenoble Alpes). Ses recherches portent sur la fabrique de la ville et les pratiques de l’architecte-urbaniste au XXIe siècle. Elle étudie plus spécifiquement le projet urbain et les processus de remodelage urbain dans les villes en décroissance en France, en Allemagne et aux États-Unis.
Claire Rosset est architecte, diplômée d’État et doctorante en architecture depuis décembre 2012 au laboratoire MHAevt (École nationale supérieure d’architecture de Grenoble – Université Grenoble Alpes), sous la direction de Catherine Maumi. Son travail de thèse interroge la construction d’un regard instruit et d’un discours architectural par les architectes au début du XXe siècle, dans la mise en place d’une pensée du projet à la fois locale et moderne.
Mots clés : bière, étiquette, représentation architecturale, Alpes, XXIe siècle / beer, label, architectural representation, Alps, 21st century
Véronique DE BRUIGNAC-LA HOUGUE, Architecture et papier peint / Architecture and Wall Paper
Le papier peint est avant tout un art d’imitation. Parmi les divers genres qu’il plagie, l’une de ses sources privilégiées est l’architecture à laquelle il emprunte vocabulaire et motifs. Cet article propose de décrire les liens existant entre papiers peints et architecture à travers quatre champs successifs. Il porte essentiellement sur la période comprise entre la mi- XVIIIe siècle et nos jours. Le premier sujet abordé est celui du vocabulaire. En effet, quelques termes sont utilisés de manière identique, d’autres le sont dans un sens légèrement différent. Une deuxième partie évoque dans quelles pièces et comment le papier peint y est utilisé. Pour cela, une nomenclature des espaces architecturaux investis et imités sera dressée. Un troisième point porte sur les ornements et les motifs employés que ce soit des matériaux, des décors ou des constructions. Une quatrième partie, enfin, traitera du papier peint, de l’architecture et de l’urbanisme, en décrivant plans, façades et perspectives urbaines.
The wallpaper is an art of imitation. Among the various genres he plagiarizes, one of his informants is architecture in which it borrows vocabulary and patterns. This article intends to describe the links between wallpapers and architecture through four successive fields. It focuses on the period between the mid-18th century and today. The first topic is the vocabulary. Indeed, some terms are used in the same way; others are in a slightly different sense. A second part evokes in what parts and how the wallpaper is used. For this, a nomenclature of invested and imitated architectural spaces will be developed. A third point concerns ornaments and employees’ patterns or materials, sets of buildings. A fourth part will deal with wallpaper, architecture and urbanism, describing plans, facades and urban views.
Auteur : Véronique de la Hougue a été, jusqu’en 2017, conservateur en chef et responsable des collections du département des papiers peints au musée des Arts décoratifs de Paris. Auteur de nombreux articles et de plusieurs ouvrages dont Le papier peint (Massin, 1995), Paule Marrot (Adam Biro, 1996), Art et Artistes du papier peint en France – répertoire alphabétique (Gourcuff – Gradenigo / Les Arts Décoratifs, 2007). Elle collabore également au livre Joseph Dufour, génie du papier peint (Mare & Martin / Les Arts Décoratifs, 2016).
Mots clef : papier peint, imitation, trompe-l’œil, vocabulaire, décoration intérieure / wallpaper, imitation, window-dressing, vocabulary, interior decoration
Julie MANFREDINI, La place du monument dans les armoiries et les logos touristiques / The place of monuments in the touristic coat of arms and logos
La politique touristique des villes françaises au cours du XXe siècle s’est peu à peu fondée sur l’élaboration de marqueurs identitaires susceptibles d’attirer le regard du touriste et d’insuffler dans son esprit l’identité du territoire. Les syndicats d’initiative et les offices de tourisme sont parmi les acteurs les plus impliqués dans cette promotion publicitaire. Les armoiries qu’ils transforment et les logos qu’ils inventent, constituent de nouvelles images supports de l’identité urbaine où le monument a une place importante. Des armoiries parlantes aux logos, les monuments ne sont plus de simples éléments d’identification mais bel et bien des éléments emblématiques de la politique touristique de la ville. Leur étude reflète les politiques de recensement et de préservation, les choix menés par ces acteurs locaux et les stratégies de communication appliquées par ces associations touristiques de la fin du XIXe siècle à aujourd’hui. Pratiques et clairs, les logos touristiques se déclinent sur divers supports, des flammes postales aux sites Internet. Lors des festivités ces nouvelles images sont exposées, facilitant leur assimilation par la population locale jusqu’à devenir un caractère inhérent de leur identité.
Touristic policies of French towns are more and more based on the creation of identity indicators succeptible of attract the tourists’ eye and provoke in his mind the territory’s identity. Tourist information and Tourist offices are some of the main stakeholders the most involved in this advertising. The coat of arms and logos, which they transform, establish new support images of the city identity where the monument has an important place. From coat of arms to logos, monuments are not just simple emblematic elements but truly symbolic element of the touristic policies of the town. Their study reflect the census strategies and preservation, choices led by these local stakeholders and the communication strategies applied by these touristic associations from the end of the nineteenth century to the present. Convenient and evident, touristic logos are available on diverse media, from postmarks to website. During the festivities these new images are exhibited, facilitate their integration by the local population until they become an inherent character of their identity.
Auteur : Julie Manfredini est chercheure associée à l’EIREST. Docteur en histoire contemporaine de l’Université Paris 1, Panthéon-Sorbonne (2015), elle a soutenu une thèse sur Le rôle des syndicats d’initiative dans la construction de l’identité française de la fin du XIXe siècle aux années 1970, sous la direction de Pascal Ory. Ses travaux portent sur l’histoire du tourisme et des représentations urbaines, et elle s’intéresse également à la mise en scène de l’identité locale et à l’histoire culturelle de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Mots clefs : Tourisme, identités, logos, publicité, patrimoine / Tourism, identity, logos, marketing, heritage
Aurore CAIGNET, Représenter et vendre des sites du patrimoine industriel dans le Nord de l’Angleterre : l’image transformée de Salts Mill et du People’s History Museum / Representing and Selling Industrial Heritage Sites in the North of England: The Transformed Image of Salts Mill and the People’s History Museum
Malgré le manque de visibilité des monuments industriels dans la documentation servant à promouvoir l’Angleterre en tant que destination touristique, ils sont une composante essentielle des paysages urbains et ruraux d’un pays considéré comme le lieu de naissance de la révolution industrielle. Cet article porte sur Salts Mill, une usine textile située à Saltaire, un modèle de conservation patrimoniale et de réutilisation par l’art, et une ancienne station de pompage hydraulique à Manchester, qui abrite désormais un musée, le People’s History Museum. Il traite de la promotion visuelle des vestiges industriels avant et après leur reconversion ou réaménagement, et explore l’utilisation du patrimoine architectural de l’industrie dans la construction d’une image positive. Les représentations de ces deux bâtiments industriels sont analysées afin d’évaluer la consommation visuelle et matérielle de l’architecture.
Despite the lack of visibility of industrial monuments in the literature promoting England as a tourist destination, they are part and parcel of the rural and urban landscapes of a country considered as the birthplace of the Industrial Revolution. The focus of this article is on Salts Mill, a textile mill in Saltaire, which illustrates successful heritage-led conservation and art-led re-use, and a former hydraulic pumping station in Manchester, which is now known as the People’s History Museum. It examines the visual promotion of industrial vestiges before and after their conversion or redevelopment, and explores the use of industrial heritage in the construction and commodification of a positive image. Depictions of both industrial buildings are analyzed in order to assess the visual and material consumption of architecture.
Auteur : Aurore Caignet est agrégée d’anglais et chargée d’enseignement à l’Université Rennes 2. Elle prépare, dans le cadre d’un contrat doctoral en civilisation britannique, une thèse en codirection avec Rennes 2 et Manchester Metropolitan University. Son domaine de recherche concerne les représentations et les réinterprétations du patrimoine industriel en Angleterre, ainsi que le renouveau de villes post-industrielles britanniques par la culture.
Mots clefs : Industrie, patrimoine, promotion, réutilisation / Industrial, heritage, promotion, re-use
Claire AZEMA, Tea & Coffee Piazza, d’une communication de marque à un manifeste du néo-design / Teapots like buildings, from brand communication to neo-design manifesto
En 1983, la marque Alessi invite onze architectes de la jeune génération à concevoir des services à thé et à café pour le projet Tea & Coffee Piazza. Ce projet est pensé par la firme comme un espace de production expérimentale indépendant des conditions de la production industrielle. Il s’inscrit pourtant dans une politique de communication de la marque qui souhaite conférer une aura culturelle à ses produits industriels. Les objets produits ressemblent à des micro-architectures de table où apparaît souvent un vocabulaire formel hérité des traditions architecturales. L’étude de ce projet nous conduit à constater que celui-ci constitue un exemple singulier d’utilisation de la référence architecturale au service d’une communication de marque, car il s’est déroulé à une époque où la marque et les praticiens de l’architecture avaient un intérêt particulier à communiquer sur des valeurs similaires auprès d’une cible commune, le grand public.
In 1983, the Alessi brand invites eleven architects of the younger generation to design tea and coffee services for the Tea & Coffee Piazza project. This project is thought by the firm as an experimental production space independent of the conditions of industrial production. It is part of a brand communication policy that wants to give a cultural aura to its industrial products. The objects produced resemble micro-architectures of table where often appears a formal vocabulary inherited from the architectural traditions. The study of this project leads us to note that this project constitutes a singular example of use of the architectural reference for the service of a communication of mark, because it took place at a time when the brand and architectural practitioners had a particular interest in communicating on similar values to a common target, the general public.
Auteur : Claire Azéma est maître de conférences en arts appliqués à l’Université Bordeaux-Montaigne où elle enseigne la pratique et l’histoire du design. Elle est chercheuse au laboratoire du MICA. Ses recherches portent sur les relations entre le design et l’art contemporain. Elle a récemment écrit plusieurs articles sur les pratiques du happening en design dans les dispositifs d’exposition du processus de conception de l’usager-producteur. Elle s’interroge également sur la production esthétique de l’usage des produits du design.
Mots clefs : Design, architecture, Postmodernisme, Alessi, Tea & Coffee Piazza / Design, architecture, Post-Modernism, Alessi, Tea & Coffee Piazza